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Foreslate, le pays sylvestre. Tu étais rarement venue ici. Tu viens de l'ouest d'Acarya : tu es née à Mulfass, puis à vivre sur Mu pour être enfin adoptée sur Arcadya. Même depuis que tu as rejoins les rangs d'Oscuro Ocaso, tu as eu peu d'occasion d'aller dans les contrées de l'est. Tu es une occidentale, pas une orientale.

Pourtant, tu t'es retrouvée ici. Tu n'aurais jamais pris cette décision toi-même, tu y a été amenée pour une certaine raison. Une mission plutôt bien payée, tout en étant simple. En effet, un riche botaniste a déposé une mission pour surveiller ses terres souvent pillées par des mécréants. Ce genre de problème est courant dans cette région. Les herbes de la capitale, Greenwood, sont très convoitées pour leurs propriétés médicinales. La plupart ne peuvent pousser qu'ici, si bien qu'elles sont rares. Cela attire forcément moult mercenaires et voleurs en quête d'argent. Tu te sens un peu attristée par cette réalité mais pourtant, c'est bien l'argent qui t'a attiré ici. Si tu n'avais pas vu cette magnifique récompense en Jewels, tu n'aurais pas traversé tout Arcadya pour venir ici.

Le riche botaniste recherchait des mages étrangers, ainsi méconnus des mécréants qui sévissent habituellement sur ses terres. Il voulait leur faire la surprise d'un garde puissant dont ils ne se méfieront pas. Tu t'es sentie parfaite pour ce rôle : tu es une inconnue à Greenwood, tu es une belle fille et tu es un dragon slayer. Personne ne pouvait se méfier de toi sans connaître ta magie très puissante. Tu es restée embauchée pendant une semaine. On t'a offert un toit et le couvert pendant cette période. Tu as pu profiter d'un luxe que tu n'avais même pas quotidiennement. La villa de ton patron de la semaine était digne d'un hôtel cinq étoiles. Tu as dormi dans un lit king size dont le matelas était aussi épais que trois fois le tiens. La salle de bain dépassait tes espérances en étant à l'italienne, tout de marbre. La nourriture était aussi tout simplement exquise. Tu étais chouchoutée par un bourgeois qui ne voulait surtout pas que tu l'abandonne.

Tu étais efficace. Les courageux qui osaient s'approcher des cultures sans se faire voir, étaient aussitôt balayés une rafale de vent. Rares sont ceux qui t'ont vu, tu étais cachée dans la pénombre des arbres. Tu leur faisais la surprise de s'envoler loin du butin qu'ils convoitaient. A la fin de la semaine, plus personne n'est venue tenter quoique ce soit : la rumeur courait qu'un vent magique protégeait ces terres. Ce serait mentir de dire que tu n'en étais pas fière.

A présent, ta mission est terminée. C'est avec regret que tu tournes le dos à la villa dans laquelle tu as si bien dormi. Mais le bruit de la bourse pleine, que tu as rangé dans ton sac en bandoulière, te rappelle que tu vas encore profiter d'une belle nuit dans un bon hôtel avant de rejoindre le QG d'Oscuro Ocaso. Après tout, ta guilde ne t'a pas envoyé de message urgent comme quoi il faut que tu rentres rapidement. Autant profiter de l'hospitalité des gens de cette région qui t'est encore inconnue.

Tu erres dans les rues de Greenwood, en repérage d'un bon restaurant et d'un bon hôtel pour un peu plus tard dans la journée. Il est encore tôt, tu as encore le petit déjeuner copieux que t'as offert ton demandeur en guise de cadeau de départ. Tu repenses encore à tout ce que tu as pu avoir par la générosité de cet homme... Dont tu ne sais pas si c'était juste par acte désespéré ou bien de bonté naturelle. Mais tu t'en fichais, tu en as bien profité c'est tout ce qui t'importe. L'image de tout ces repas somptueux, du lit où tu as dormi, des douches que tu as pu prendre te faire perdre conscience de la réalité où tu te trouvais. Tu continuais de marcher sans faire attention autour de toi. Ce n'est que quand tu t'es cognée contre un homme que tu as retrouvé les pieds sur terre. Tu n'y es pas allée de main morte, si tu tiens encore debout c'est grâce à tes réflexes que tu as acquis en t'entraînant. Ton nez est endolori et tu te le frottes pour soulager la douleur.Tu regardes l'individu que tu as dérangé. Tu affiches un air inexpressif, comme si le sort de cet homme t'importais peu. Pourtant, tes yeux indiquent le contraire. Ils montrent une certaine inquiétude.

« Je suis désolée, vous allez bien ? »

Même si tu te doutes que l'homme devait te prendre pour un moucheron vu sa taille, tu es polie et cette question t'es venue naturellement. Bien que tu sois froide, tu as été éduquée et tu souhaite faire honneur à cette éducation que tu as reçu.

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Même si ton nez a pris un sacré coup, la douleur se fait plus supportable. Tu ne t'étais pas rendue compte à quel point le choc a été violent. L'individu que tu as bousculé s'est retrouvé par terre. Tu lui tends ta main afin de l'aider à se relever, tandis qu'il s'excuse à son tour. Vous étiez tout les deux ailleurs dans vos pensées. Ce contact n'était pas un hasard. Tu le tires vers l'avant, afin de lui donner de l'élan pour se relever. Même si tu paraît frêle avec tes bras fins, tu as quand même une sacrée poigne et de la force. Tu arrives sans aucun problème à aider cet homme qui fait bien deux têtes de plus que toi. Tu ne t'en rends pas forcément compte, ne faisant pas attention aux grimaces douloureuses des personnes à qui tu sers la main. Tu remarques qu'il est assez maigre sous sa veste en cuir. Tu te trouves une excuse en te disant qu'il est plus léger que sa taille ne le paraît. Voilà comment tu caches cette force que tu as obtenu en t'entraînant avec un dragon et un maître escrimeur. Pourtant, ta force physique n'est pas ce que tu considères comme un atout dans un combat. Tu privilégies la vitesse pour ainsi donner plus de coups et surprendre l'adversaire. Tu as un style bien à toi mais qui te convient parfaitement.

Tu te rappelles que l'homme cherchait un bon endroit où manger. Nouvelle coïncidence, tu étais en train d'en chercher un aussi. Intérieurement, tu es déçue mais tu n'affiches pas cette moue. Comme à tes habitudes, tu as appris à garder ces lèvres droites, ne voulant rien révéler sur tes pensées à qui que ce soit. Mais tu ne te rends pas compte à quel point tes yeux te trahissent. Tes grands iris, du même bleu que le ciel, sont si brillants qu'il est possible d'en discerner la moindre variation de lueur. Et ils changent en fonction de tes émotions. Tu te demandais toujours comment Aria, Mufas et maintenant Haku arrivaient à lire dans tes pensées. Ce n'est pas parce qu'ils ont un pouvoir de perception. Ils les connaissent par ton regard. Il suffit de rester avec toi pour comprendre comment il fonctionne.

« J'en cherchais un aussi, enfin j'ai plutôt fait du repérage et j'étais en train de me décider. »

Tu repensais aux différentes enseignes qui t'avaient marquées. Mais tu te rappelles vite qu'aucune ne t'avaient vraiment donné envie avec ce que tu avait mangé durant ta mission. Une nouvelle fois, tu étais déçue. Néanmoins, tu devais quand même répondre à cet homme qui n'étais pas d'ici. Tu as rapidement déduit de sa question qu'il était un étranger. Tu supposais que les habitants de Foreslate devaient connaître Greenwood, leur capitale, et donc les meilleurs restaurants. Certains devaient avoir une bonne renommée. Cependant, tu n'étais pas au courant des réputations des divers restaurants du coin. Faire son choix sur ce critère est difficile.

« Mais je n'ai pas su choisir. Que voulez-vous manger ? »

Tu te rappelais des divers menus que proposaient les restaurateurs. Tu pourrais au moins le guider sur ce point là. Tu t'intéresses plus à l'homme aux cheveux gris que tu guidais. En plus d'être grand et maigre, son teint est assez pâle. Soit il a été très peu exposé au soleil, soit il est comme toi et ne peut tout simplement pas bronzer. Toi aussi tu es blanche, mais cela se voit moins car tes cheveux le sont encore plus. Ses vêtements ne sont pas usés. Mais tu ne penses pas que c'est un maniaque de l'entretien des tissus. Toi aussi, tes vêtements font très propres. Tu les gardes toujours d'un blanc immaculé. Comme cette robe qui descend jusqu'aux genoux que tu t'es fait un plaisir d'enfiler après ta semaine en mission. Ta veste et tes bottes sont tout aussi impeccables. Mais ils ne sont pas neufs. Grâce à ton odorat de dragon slayer, tu sens l'odeur de neuf de sa veste en cuir.

« Vous venez de faire quelques emplettes à ce que je vois. »

Tu as beau dire ça d'un ton froid, tu es quand même curieuse. Il t'arrive parfois de te laisser aller à ce sentiment que tu essayes d'oublier. Mais tu ne peux pas refouler ta véritable nature. Tu veux changer afin d'être une mage impitoyable pour servir la cause d'Oscuro Ocaso. Mais comment détruire ce que tu étais pendant vingt ans ? Tu n'as que cinq années de plus, tes moments passés avec Aria et Mufas sont encore proches. Tu cherches à oublier ces instants que tu as appréciés à leurs côtés. Mais tu ne peux pas. Et tu n'y arriveras jamais. Car tu les aimes trop. Aria restera ta mère et instructrice de magie, Mufas ton grand-père et maître d'escrime. Tu ne peux pas les balayer de ta mémoire. Ils sont ancrés en toi, ils font parti de toi. Tu ne peux pas aller contre ta nature. Tu es Edelweiss Ackroyd, et tu ne devrais pas l'oublier.

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Le jeune homme gris te fournit beaucoup d'informations. Peut-être est-il simplement bavard, mais tu trouves qu'il a un air un peu perdu. Ton hypothèse qu'il soit un étranger s'avère être vraie. Il est un homme pommé, ne sachant pas vraiment où aller. Il doit se dire qu'il a de la chance d'être tombé sur toi : il a pu te dire qu'il cherchait quelqu'un pour le guider. Bien que tout le monde aurait pu faire l'affaire. Mais tu as eu la malchance de rentrer dans lui, si bien qu'il était plus facile pour lui d'enchaîner une conversation. Tu l'écoutes dire ses nombreux propos. Tu n'es pas très bavarde. Tu t'es renfermée depuis la disparition d'Aria. Elle était la seule personne avec qui tu as vécu pendant dix ans. Enfin personne, plutôt une dragonne... Ça ne t'as pas vraiment aidé à tisser des liens avec les individus de la même espèce que toi. Pourtant, un bipède n'est pas plus impressionnant qu'un dragon, bien au contraire...

Tu fus surprise d'entendre qu'il ne savait pas lire. Tu t'es demandée quel âge peut-il avoir : son visage est assez jeune mais il a bien plus de seize ans. Dix huit te semble une bonne estimation. Alors pour qu'il ne sache pas lire, il faut qu'il ait été isolé de la civilisation. La lecture est indispensable dans le monde actuel : tout est écrit. Les informations, les livres, les missions et même les menus des restaurants. Voilà pourquoi il a besoin de ton aide. Bien qu'aider généreusement un individu n'est pas dans tes habitudes, ni même dans tes cordes, tu culpabiliserai de le laisser seul. D'autant plus qu'il semble avoir un problème avec un certain groupe...

« Blood Fountain... »

Tu murmures tes pensées afin de t'aider à réfléchir. Tu doutes que le jeune homme ai entendu ces paroles. A vrai dire, ce nom t'évoque quelques souvenirs. Au sein d'Oscuro Ocaso, tu avais entendu parler de mages qui s'étaient réunis autour d'une expérience occulte. Ta guilde n'était pas vraiment familière avec eux, tu te souviens avoir entendu l'idée de les éradiquer. Mais ton maître n'a jamais accepté cette proposition, ce n'était qu'un groupe mineur après tout. Depuis, tu n'en as jamais entendu parler.

Tu étais replongée dans tes réflexions, comme lorsque tu as rencontré cet homme. Tu entends vaguement le compliment qu'il te fait, mais tu supposes que cela devait te faire plaisir en voyant le sourire qu'il te fait. Tu aimais les compliments et tu regrettes de ne pas l'avoir écouté. Ton ego en serait flatté... ou pas. Il répond finalement à ta question première, au sujet de la nourriture. Il ne tolère pas la viande. Ça ne t'aide pas vraiment : tout les restaurants proposent des plats sans viandes, il suffit de demander. Tu as envie de lui poser des questions, afin qu'il soit plus précis sur sa recherche mais tu t'abstiens. Tu le revois avec son air égaré, perdu dans un endroit qu'il ne connaît pas. Ça te rappelles des souvenirs. Que serait-tu devenue si Aria ne t'avait pas gardé et éduqué ? Tu n'aurais jamais survécu sur les terres hostiles de Mu. Tu étais perdue quand tu t'es retrouvée sur la plage d'émeraude à Arcadya. Mufas t'as aidé à reprendre du poil de la bête et t'as appris à vivre aux côtés des humains. Tu as reçu une aide précieuse quand tu en avais besoin. Et cet homme est dans ce cas là.

Vas-tu suivre le chemin de tes prédécesseurs ? Venir en aide à cet homme comme l'ont fait tes deux modèles ? Bien que tu veuilles te débarrasser de cette gentillesse et naïveté qui font parties de ta nature première, tu veux faire honneur à ceux qui t'ont élevé. Sans eux, tu sais que tu n'aurais jamais eu cette magie et cette maîtrise de l'épée que tu utilises sans cesse. Tu serais faible sans ça, et tu veux être forte. Aller contre le sens qu'ils t'ont montré serait contredire les principes que tu t'es fixée pour devenir ce que tu veux être. Alors tu n'hésites plus.

« Tu m'as l'air perdu. Je ne sais pas d'où tu viens, ni même ce qu'on t'a appris mais je veux bien t'aider. »

Aider est peut-être un bien grand mot. Tu n'as pas non plus envie qu'il te colle aux basques. Il reste un inconnu et tu te méfies de lui. Il a beau avoir l'air innocent et pommé, tu ne sais pas s'il dit la vérité. De plus, il a l'air d'avoir un passé étrange qui semble le poursuivre. Cette histoire avec Blood Fountain ne te rassures pas vraiment...

« Mais ne t'attend pas à ce que je te maternes. Je vais t'aider à t'y retrouver, c'est tout. »

Tu mets les points sur les i afin de te montrer claire avec lui. Peut-être va-t'il insister, mais tu vas être tout de suite ferme.

« Suis-moi, je t'emmènes à un endroit où tu pourras manger. »

Alors que tu te retournais pour aller au restaurant, tu t'arrêtes soudainement.

« Au fait, t'as de l'argent ? »

Il était perdu mais avait quand même trouver les sous pour s'acheter une belle veste en cuir, et peut-être même plus. Tu le regardes suspicieusement. Tu n'avais aucunement l'intention de partager cette bourse pleine que tu as dans ton sac. Tu l'as gagné honnêtement, tu en fais ce que tu veux. Depuis que tu as suivi Haku dans Oscuro Ocaso, un côté égoïste, allant même jusqu'à l'avarice, s'est développé. En effectuant des missions, tu as pris conscience de l'existence et l'utilité de l'argent. Alors forcément, tu veux en gagner le plus possible, et le garder.

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Il te montre une bourse bien pleine, te prouvant ainsi qu'il a ce qu'il faut pour substituer à ses besoins. Tu remarques l'étrange symbole sur le sac, sans vraiment comprendre sa signification. Mais tu ne chercha pas plus loin. Il te propose de payer ton repas, offre que tu déclines gentiment.

« Non ne t'en fait pas, j'ai ce qu'il faut aussi. »

Tu préférais te débrouiller seule au niveau financier. Certes, tu aimais bien garder ton argent, mais tu aimais encore moins profiter de la gentillesse des autres. Tu voulais être indépendante. Même si tu progresses sur cette voie là, c'est un peu paradoxal en sachant que tu suis toujours Haku quand il est avec toi. Tu dépends beaucoup de cette personne, sans vraiment que tu en prennes conscience.

Il te parle de la beauté de l'endroit et des bonnes ondes qu'il émet. Tu ne faisais pas vraiment attention à l'environnement autour de toi, cela faisait une semaine que tu étais ici. Tu avais eu le temps de t'émerveiller le premier jour. Tu étais ensuite concentrée sur ta mission et le confort que t'a procuré le botaniste. Il est vrai que voir tout ces arbres et les habitations construites à l'intérieur, ou bien autour voir même suspendues, n'est pas quelque chose de courant. Tout cela t'avait paru bancal au départ. Tout était si désordonné, les bâtiments étaient placés suivant les choix de la nature. Mais tu t'es vite rendue compte que cela faisait parti du charme de Greenwood. Tu peux comprendre le ressenti du jeune homme. Néanmoins, tu ne lui as pas répondu. Tu t'es contentée d'un regard autour de toi avant de souffler et de te retourner.

Tu amènes le jeune homme sur une terrasse d'un restaurant dont il émane de bonnes odeurs. Mais le nom n'était pas vraiment aguicheur : "A la Cervoise d'Irmak", il te faisait plus penser à celui d'une auberge au bord d'une route. Il devait être un peu avant midi, mais les tables commençaient à se remplir. La vue de ce monde si tôt te rassura : la nourriture ne devait pas être si mauvaise. Un serveur arriva et vous propose une table pour deux. En vrai gentleman, il recula ta chaise afin de t'aider à t'asseoir et s'inclina poliment. Peut-être faisait-il ça avec toutes les femmes, mais tu apprécies cette petite marque d'attention. Il est vrai que tu fais de l'effet à la gente masculine : tu as un joli visage, un beau corps et tu te vêt de manière féminine. Le blanc donne l'impression que tu es une personne si pure que l'on ne veut pas tâcher. Tu as un charme certain et tu le sais. Même si tu ne t'es toujours pas décidée à montrer un sourire...

Il te donne un menu et tu le parcoures du regard. L'enseigne propose divers plats, allant des plus simples aux plus compliqués pour leurs spécialités. Certains ont des noms vraiment étranges, et tu te demandes de quoi il peut bien s'agir. Tu étais obnubilée par la carte lorsque l'homme qui t'accompagnait te sors de tes réflexions. Tu l'avais presque oublié tiens ! Tu te rappelles qu'il t'avait dit qu'il ne savait pas lire. Effectivement, pour choisir un plat, cela allait être compliqué ! Il se présente sous le nom de Gray, qui lui a été donné en référence à la couleur de ses cheveux. Par contre, il te dit qu'il s'appelle aussi 25, ce qui t'étonnes d'avantage.

« 25 ? C'est pas un prénom, c'est un numéro. Qui peut bien t'appeler ainsi ? On donne des numéros aux gens en prison, qu'on appelle matricule... Ou bien aux rats de laboratoire mais sinon jamais, c'est inhumain. »

Tu es en train de penser que tu vas partager un repas avec un potentiel évadé de prison. Cela ne te rassures pas du tout. Et s'il était connu des forces de l'ordre ? Le Dark Chess contrôle tout et leurs méthodes sont loin d'être respectables... S'ils retrouvent cet homme en ta compagnie, tu risque de passer un mauvais quart d'heure... Voire même plus.

Tu le regardes pour essayer de confirmer ton hypothèse. Ses cheveux gris sont peu communs, s'il était un criminel connu, un chasseur de prime ou un mage noir de l'Empereur l'aurait reconnu immédiatement. Tu déplaces ton regard autour de toi mais tu ne remarques rien de suspect. Tu ne vois pas de personnes te regarder bizarrement, et tu ne sens pas non plus cette odeur reconnaissable d'un mage de Dark Chess. Pour te rassurer encore plus, tu goûtes l'air qui a la même saveur que d'habitude. Tu souffles pour te détendre et reprends tes esprits. Le type qui te fait face n'a pas l'air si méchant non plus. Il a cet air un peu stupide de quelqu'un de perdu. Tu ne penses pas qu'il va chercher à faire quelque chose de dangereux. Il a l'air d'apprécier grandement ton aide, il ne va pas t'égorger. Du moins pas maintenant ? Tu n'en savais rien. Tu ne connais rien de ce type, mis à part qu'il a des problèmes avec une guilde noire, qu'il ne sait pas lire, qu'il a de l'argent et qu'il s'appelle Gray ou 25. Avec ces informations, tu en déduis juste que tout ça n'est pas très net, mais pas forcément un danger.  

« Je m'appelles Edelweiss, un nom qui m'a été donné aussi en rapport avec ma couleur de cheveux. »

Tu ne sais pas pourquoi tu développes ainsi, mais tu as trouvé un point commun avec le jeune homme. Votre nom a la même origine. Tu te rassures certainement par cela.

« Par contre, il faut que tu m'expliques certaines choses. »

Le serveur revient en vous demandant si vous avez choisi un plat. Tu regardes Gray pour savoir ce qu'il avait décidé avant de te rappeler qu'il comptait sur toi pour l'aider à déchiffrer la carte. Tu demandes simplement ce que le restaurant propose sans viande, seul critère que le gris t'avait donné. Il te propose divers plats :

« Le panier d'automne est notre plat de saison. Il est composé de divers légumes, comme des carottes, courgettes, poireaux, courges, choux, salade, poivrons et des châtaignes grillées. Nous avons également des salades à vous proposer ainsi que les plats de poissons. »

Tu ramènes ton regard vers le jeune homme.

« Tu manges du poisson ? »

Tu ne savais pas s'il prenait en compte le poisson dans le terme viande. Est-il végétarien ou tout simplement intolérant à la viande ?

« Pour ma part je vais prendre un poulet à la... Vlu... Flütrtayab ?
- Vüluftratiyad.
- Oui c'est ça. »

Tu t'étais décidée par prendre un plat au nom imprononçable. Tu ne savais pas vraiment de quoi il s'agissait, mais tu voulais essayer quand même. Le serveur prend en note ta commande et se tourne vers Gray. Tu l'aides à choisir un plat et une fois l'homme parti, tu reviens à la discussion initiale.

« Bref, je veux que tu m'expliques d'où tu viens, ce que tu fais là, quel est ton but. Avec tout ce que tu m'as raconté pour le moment, je trouves que tout n'est pas net chez toi... »

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A croire qu'il devait en parler de son passé à quelqu'un, il n'hésita pas tout te raconter, en commençant par commenter sa couleur de cheveux. Il est vrai que chez lui, tout est gris, même ses yeux. Tu pensais simplement qu'il s'agissait d'un gène rare, tout comme toi tu as les cheveux blancs, ce qui n'est pas courant non plus. Mais ton hypothèse s'avère être fausse : il utilise une magie qui lui draine son sang, et par conséquent son énergie. Il est vrai que cela peut expliquer son teint faiblard, accentué par ses cheveux. Mais tu n'avais jamais entendu parler d'une magie pareille. C'est comme s'il devait passer un pacte avec un diable. S'il voulait utiliser son pouvoir, il devait offrir au démon du sang. Tu avais déjà lu ce genre de choses dans des livres très ancien que gardent précieusement ta guilde. Néanmoins, tu restes assez sceptique sur ce sujet...

Il continue à déballer tout ce qu'il a sur le coeur, en prenant le soin de chuchoter. Tu t'es avancée pour mieux l'entendre. Ce qu'il te raconte ne te plaît guère. Son histoire est vraiment sombre et cruelle. Toi qui habituellement ne bouge pas tes lèvres pour exprimer tes sentiments, tu as grimacé de dégoût en imaginant la scène d'enfants affamés, se jetant les uns sur les autres pour se nourrir. Une image d'horreur que tu effaces difficilement. Tu le laisses finir en l'écoutant attentivement. Il justifie le fait d'avoir acheté des armes pour se défendre de Blood Fountain, la guilde qui a commis ces atrocités. Il n'est pas près de revenir chez ceux qui l'ont enfermés... Ce que tu peux tout à fait comprendre.

Quand il se tait, tu t'appuies sur le dossier de ta chaise et retournes dans tes pensées. Tout cela te paraît tellement atroce, tellement obscur et horrible que tu as du mal à y croire. Néanmoins, tu ne penses pas que Gray te mente. Tu n'as pas senti sa voix faillir, il parlait déterminer de fuir son passé. Même ses yeux sont sincères, tu ne peux que le croire.

« Et bien c'est... assez incroyable. Et horrible aussi. Je ne connais pas très Blood Fountain, j'en avais juste entendu quelques rumeurs sur le fait qu'ils font des expériences occultes. Je crois bien que tu confirmes ces propos. »

Par contre, une question subsiste. Dois-tu ranger cet homme dans tes ennemis ou neutre ? Rester enfermer pendant quinze ans ne doit pas l'avoir rendu bien net. Il peut être pris de paranoïa de voir un éventuel membre de ses geôliers et avoir des réactions imprévisibles. Même s'il apparaît innocent et comme une victime, tu ne peux pas nier le fait qu'il soit armé et donc dangereux. De même sa magie étrange ne te rassures pas vraiment. Néanmoins il a accepté de se confier à toi alors que vous ne vous connaissez pas. Tu lui as juste dit ton nom, mais il ne sait rien d'autre à ton sujet. Il te fait confiance, mais toi non, tu restes méfiante.

« Par contre, je penses que Blood Fountain t'a laissé partir car ils ne doivent plus exister. Si les runes se sont éteintes, c'est qu'il n'y avait plus personne pour les entretenir. »

Tu repenses à la requête qui a été faite au maître de ta guilde pour les exterminer. Tu te souviens pourtant qu'il a refusé. A-t'il changé d'avis ? Ou bien une autre guilde s'est occupé de leur cas... Mais dans tout les cas, cela fait un moment que tu n'as pas entendu le nom de Blood Fountain.

« Tu peux donc te rassurer je penses, personne ne devrait vouloir t'enfermer à nouveau. »

Même si tu ne souris pas, tes yeux sont sincères. Tu veux le calmer avant qu'il ne soit trop tard. Tu n'as pas envie de te sentir responsable d'un homme attaquant des innocents par une crise de paranoïa...

Le serveur revient avec les divers plats et tu es étonnée de voir à quel point ton plat est bien présenté. Le poulet est rôti de manière à l'avoir doré à souhait. Mais il ne s'agit pas d'un simple poulet rôti, tu peux sentir diverses épices, légumes, agrumes et autres saveurs sucrées. Tu arrives à identifier du miel. Cela te met l'eau à la bouche.

« Bon appétit. »

Tes yeux brillent devant un si beau plat. Ta gourmandise est sûrement ton pire défaut. Tu attaques ton plat sans perdre de temps et croque dans la première bouchée. Un mélange de saveur qui explose en bouche te surprend. Tu es vraiment surprise qu'une enseigne avec un nom peu aguicheur puisse servir un si bon plat. La bouche de nouveau vide, tu questionnes ton compagnon :

« C'est bon ? »